L’extraction dans le bassin minier de Graissessac au Bousquet d’Orb commence au Moyen-âge, par des exploitations artisanales à ciel ouvert. Les premiers sites exploités par affleurements et répertoriés sur le bassin seront ceux d’Alzou (1302) et de Cap Nègre (1345).

Panneau visible dans le musée « Graissessac autrefois » (plateau Ste Barbe, Graissessac) animé par l’Association « Des Pierres et du Charbon »
Le hameau d’Alzou
Alzou était le nom d’un petit hameau, proche du hameau de Sénégra, qui a fait parti de la borronie de Boussagues puis de la commune de Camplong, de Boussagues puis de La Tour sur Orb. En 1856 il était constitué de 4 maisons d’habitation. En 1936, 3 maisons étaient encore habitées, dont une par un couple originaire d’Espagne. Employés par la Compagnie des 4 mines, l’homme était mineur et la femme lampiste. Les derniers bâtiments ont été détruits dans les années 1950 pour laisser la place au carreau d’Alzou et aux engins des mines « découvertes » de Cap Nègre et d’Alzou.




Alzou dans les années 30. Le dimanche, les habitants de Frangouille et de St Xist montent à Alzou pour retrouver leurs amis d’Alzou et Sénégra. Les jeunes gens grimpent dans les wagonnets et s’amusent à se faire promener sur les rails.
Photo de gauche: En arrière plan, le viaduc d’Alzou. Sur la droite, un bâtiment en ruine du hameau d’Alzou. En bas à droite, assise, une jeune femme, habitante de Frangouille, qui deviendra, quelques années plus tard, la marraine de la cloche de l’église de Frangouille.
Photo de droite: Entrée du viaduc d’Alzou. Les rails permettaient au charbon extrait des mines de Cap Nègre et de Coustière de rejoindre le Bousquet d’Orb via la galerie d’Orb. A droite un bâtiment du hameau d’Alzou.
Photos familiale mises à disposition par Pierrette (habitante de Frangouille).



En 2024, sont visibles, sur la zone d’Alzou, un escalier en béton qui ne mène nulle part, un ancien puits et le cèdre d’Alzou (photo 2023), seuls rescapés du hameau d’Alzou. Cèdre planté en 1919 par Paul Lugagne et sa soeur Madeleine Mazet devant leur maison
Mines souterraines d’Alzou



Une exploitation de charbon de pierre est attestée au manse d’Alzou en 1302, 1332, 1394 (F Pasquier et S Olive “le Fonds de Thésan” A.D.H Tome VIII Montpellier 1913). Celle de Camp Nègre est attestée en 1348, 1376, 1383.





L’exploitation artisanal des mines d’Alzou perdure pendant plusieurs siècles. Au XIXe siècle, plusieurs mines, percements ou galeries sont répertoriés sur le secteur d’Alzou, et pour la plupart, parfaitement localisés grâce aux cadastres napoléonien (1826).
En 1813, le transport du charbon se fait par sac, à dos d’homme ou avec des corbeilles que l’on déplaçait par trainage (corbeilles et sac utilisés jusqu’en 1860) depuis la zone d’abatage jusqu’aux galeries de service où ils sont vidés dans des brouettes ou dans des wagonnets lorsqu’il existe des voies (au départ en bois). En 1813, dans la mine d’Alzou, un manœuvre fait trente voyages par jour avec 100 kg par brouettes sur une distance de 200 mètres correspondant à la longueur du percement au jour de la mine. A la même époque, on sort 180 brouettes par jour par la galerie de Cap Nègre. La brouette sera supprimé au profit du « chien de mine ». Le « chien de mine » ou « chien cloud » était un petit wagonnet d’une contenance d’environ 200 kg, à roues, circulant sur deux rails en bois. Gilbert Crépel, dans son ouvrage « le haut pays minier », indique que ce procédé de transport était connu depuis au XVe siècle et que son nom provient du fait que le frottement des roues en acier sur les rails en bois, humide et couvert de poussière, faisait un bruit semblable aux aboiement d’un chien.
Le charbon est par la suite acheminé par mulets jusqu’aux villes et villages. Les voies de communication manquent. A cette époque les mines d’Alzou n’ont pour seul débouché que la verrerie située sur la commune de St Martin (Bousquet d’Orb). Les jours de grosses pluies ne permettent pas le travail dans les mines car l’acheminement est rendu impossible à cause de la dégradation des chemins et des ruisseaux difficile voir impossible à traverser.
En raison de son isolement, l’exploitation des mines d’Alzou cessa en 1815. Les massifs de houille connus sont épuisés et l’exploitation des mines de Cap Nègre, plus avantageusement offre plus de débouchés.

Sur la carte de l’IRSP, les mines repérées A, B et C correspondent aux mines d’Alzou : mine basse, mine haute et mine du Rec. Il n’a pas été possible de distinguer les unes des autres. Le percement Eugène est ouvert après 1860 à l’altitude de 409 m. Il semble que l’entrée du percement Eugène soit cette entrée visible au bord de la piste ouverte par la Cogéma. Ne pas confondre le percement Eugène (secteur d’Alzou) avec la mine Eugène N°2 du Devois de Graissessac.
Dans l’ouvrage de Gilbert Crepel « Le haut pays minier », l’auteur décrit uniquement 2 mines sur Alzou, la mine haute et la mine basse dite du Rec d’Alzou.
Dans son ouvrage de 1838 (Etude du bassin houiller de Graissessac), Napoléon Garella fait une description technique des 3 mines d’Alzou (Mine Basse, Mine Haute et Mine Rec) ainsi que des anciennes mines de Cap Nègre:
« La mine Haute et la mine basse semblent avoir été ouvertes sur la même veine. La différence de niveau entre les 2 mines et de 60 mètres. La mine basse est, d’environ 70 mètres plus élevés que les maisons les plus hautes du hameau d’Alzou. Le percement de la mine basse du être très probablement parallèle à celui de la mine haute. La mine du Rec d’Alzou, la plus basse de toutes est divisées en 2 portions. Les travaux ne se sont étendus qu’à 130 mètres de l’ouverture« .
Les mines d’Alzou seront réouvertes en 1895 puis exploitées jusqu’au début du XXe siècle. Certaines anciennes mines d’Alzou ont servi de cache pour des résistants en juin 1944.
Entrée d’une galerie partiellement murée puis grillagée qui semble être l’entrée du percement Eugène (altitude 409 m) photo prise en 2023. Cette entrée se trouve au bord de la piste ouverte par la Cogéma lors de leur campagne de forage (début des années 1990).


Liste des galeries exploitées dans les mines d’Alzou
Cette liste des noms des percements, plans ou couches exploités dans les différentes galeries des mines d’Alzou est non exhaustives, elle est le résultat des recherches faites à l’aide des carnets disponibles aux Archives Départementales de L’Hérault datant de 1884 à 1900:
Percements: Au mur, Eugène, Jacques … Plans : Boyer N°1 et N°2, Jean, Nieb, Rnas, Maitresse, Bessière, Crébasso, Lacaze, Mathieu, des balais, Massol, Courteau, Fashoda, Casimir, Roux, Louis, Trinquier, Trabasse, Mathieu, Causse, Crouzat, Astier … Descendant de la poudrière, Ernest, Paul …
Les levés à la boussole et les coupes de couche des mines d’Alzou
Nous avons retrouvé, en salle de lecture des Archives Départementales de l’Hérault, des carnets des levés à la boussole suspendue et des carnets de coupe de couche de galerie des mines d’Alzou.
Les levés sont effectuées avec un type de boussole disposant d’un dispositif à la Cardan, suspendue à des cordeaux, pour le lever de galeries étroites. Les mineurs voient donc régulièrement le géomètre avec ses instruments, prenant des mesures des nouveaux travaux, marquant pour eux la direction à faire prendre à la galerie d’avancement ou à la galerie au rocher pour retrouver la couche de charbon. « Il nous fait des marques au toit sur les boisages et nous n’avons plus qu’à suivre cette direction…Et toutes les quinzaines, il passe pour évaluer le tonnage à abattre.» Extrait du site du musée de la mine de Ronchamp. Voir sur le site les expliucation du travail des géomètre dans les mines.



Extrait de carnets des coupes de couche des mines d’Alzou. Couche : dépôt de charbon en banc très net, d’épaisseur variable, et le plus souvent pentu.


Le terril d’Alzou
Le rapport Géodéris de 2015, signale que le terril d’Alzou (déblais de mine de type schistes très charbonneux) situé en fond de vallon sur des pentes tout au plus modérées est en pied à proximité immédiate du ruisseau d’Alzou (ruisseau de Rigaussel ?) est un terril à caractère de combustibilité potentielle.
La machine à vapeur d’Alzou
Dans son ouvrage « Le haut pays minier », Gilbert Crepel indique que les chaudières qui produisant de la vapeur étaient toutes installées à l’extérieur. Elles pouvaient alimenter les machines des puits d’extraction, les lavoirs, notamment pour les tables de criblage à secousses, certain treuil, comme celui installé au sommet du plan incliné Despous en 1892, au Bousquet d’Orb (NDLR, probablement de la concession du Bousquet d’Orb), les ventilateurs d’aérage situé à l’entrée des bouches des mines, ainsi que les machineries des compresseurs d’air.
A quelques mètres de la trajectoire du funiculaire qui reliait Alzou à la mine de Leenhardt, gît la carcasse d’une chaudière ou machine à production de vapeur. Vu son emplacement actuel, proche de l’axe du plan incliné Despous, proche d’une plateforme ou se trouve des anciens tuyaux, il est possible d’imaginer que cette chaudière était peut-être celle qui faisait fonctionner le treuil du plan incliné Despous.



Les restes de cette machine sont tout proches d’une plateforme sur laquelle se trouvent des restes de tuyaux métalliques.



Mines souterraines du Cap Nègre d’Alzou
Camp Nègre est une déformation assez récente du nom de Cap Nègre (tête noire). Ainsi appelé car en haut de cette montagne, les couches de charbon, presque verticales, affleuraient le sol dans les châtaigneraies (Bulletin 09-1986 S.A.H.H.C.H.). L’exploitation par affleurements commence autour de 1345.
La concession de Boussagues avait pour limite le ruisseau de Rigaussel et l’Orb. Les sites de la rive droite du ruisseau comme celles du Cap Nègre faisait donc parties de la concession de Boussagues.
En 1792, 60 000 quintaux de charbon sont extraits des 3 mines de La Padène, Cazarides et Cap Nègre.
En 1800, réouverture de la mine ancienne du Cap nègre (altitude 520 m). Début 1801, les citoyens Belugon et Salas avaient obtenu une autorisation provisoire d’exploitation sur le revers de la montagne de Cap Nègre, au nord de la crête et au sud du ruisseau. Cette exploitation comportait 3 extractions par tranchée ouverte de faible importance et 2 galeries. L’une avait été tracée sur une longueur de 66 m et avait rencontré une couche de charbon de 1,5 m d’épaisseur, l’autre de 86 m avec une section de 1,5 m de largeur et 1,75m de hauteur.
La mine du Cap Nègre fut abandonnée en 1829 après le déhouillement complet du Grand-Pas.
L’exploitation industrielle de la mine du Cap Nègre (altitude 413 m) reprend en 1870 sur la rive gauche du ruisseau de l’Espaze (Camplong) et sur la rive droite du ruisseau de Rigaussel (Alzou). En 1877, Cap Nègre, voit l’Installation d’un lavoir sur le terrier de la mine d’Orb.
Dans les rapports et délibérations du conseil général de l’Hérault du 01 aout 1900, on peu lire que dans la mine du Cap-Nègre ont a continué les reconnaissances en direction des couches N°1, Félicie et Zélia. Ces couches se sont montrées fréquemment dérangées (par le feu ?).

Liste de galeries exploités dans les mines du Cap Nègre
Cette liste de noms de percements, de plans, de couches exploités dans les différentes galeries des mines du Cap Nègre est non exhaustives, elle est le résultat des recherches faites à l’aide des carnets disponibles aux Archives Départementales de L’Hérault datant en 1884:
Percements: Paul … Couches N°2, Félicie, Zélia … Plans: Lazard, Boudet, Corneilhe, Durails, Théodore, Struzel, Balcot, Michel, Jean, Guillot, Antoine…
Les toisés et les coupes de couche de la mine du Cap Nègre
Les Archives Départementales de l’Hérault conservent une série de toisés de la mine du Cap Nègre de 1925. Ces toisés permettaient aux superviseurs de noter pour les mineurs, le plan ou la couche de charbon dans laquelle ils travaillaient et le salaire de la quinzaine qui leurs était dus.


Extrait d’un carnet des coupes de couche de la mine du Cap Nègre. Couche : dépôt de charbon en banc très net, d’épaisseur variable, et le plus souvent pentu.

Le viaduc d’Alzou
Pour évacuer la houille des mines de la rive droite du ruisseau de Rigaussel (Cap Nègre, Coustière), les exploitants font construire (fin du XIXe ?) un viaduc dit « Viaduc d’Alzou ». Bâti en maçonnerie de 6 ou 7 arches plein cintre, long d’environ 118 mètres, haut d’environ 15 mètres, sa largeur est estimée à 2,5 m. Il enjambe le ruisseau de Rigaussel, et permet de transférer la houille vers le Bousquet d’Orb en passant sous le mont Sénégra via le percement d’Alzou et la galerie d’Orb. Toutes les mines étant reliées au réseau de roulage de la concession du Ruffas.



Deux vues du viaduc peu avant sa destruction. Sur la photo de gauche on distingue le cèdre d’Alzou au dessus du carreau d’Azou.

Après reconversion de l’exploitation souterraine en extraction par découverte à l’air libre, les sorties des galeries ont été volontairement effondrées, le viaduc détruit (fin des années 90) et tout le secteur a été profondément modifié et rendu totalement méconnaissable, si bien qu’il est aujourd’hui difficile de situer l’emplacement exact de cet ouvrage d’art.
Les mines « découvertes » de Cap Nègre et d’Alzou
A partir de 1956, l’exploitation souterraine décline et commence l’exploitation à ciel ouvert. Le principe de la mine appelée “découverte” repose sur la réalisation de fosses ou à flan de colline en gradins. Le travail de mineur change totalement, la mécanique supplée les hommes, la montagne est « saignée » par les pelles mécaniques et des engins puissants poursuivent l’abattage, et l’arrachage du charbon.
Dans les années 60, le bassin de Graissessac fut divisé en cinq quartiers correspondant chacun à un massif montagneux. Ces secteurs furent nommés d’Ouest en Est : Les Salles (non exploité mais reconnu), Rive Droite, Rive Gauche, Cap Nègre et L’Orb.



Sur l’ensemble du bassin, on distingue 7 secteurs de fosses, pour un total de 29 fosses dont 7 fosses sur Cap Négre et 2 fosses sur les secteurs d’Alzou (dernière zone en exploitation).





Le charbon extrait des “découvertes” de Cap Nègre et d’Alzou rejoint Camplong, en camion, par les pistes de montagne, puis est déversé dans le puits Durand. Lequel, équipé d’une trémie souterraine géante et d’un toboggan hélicoïdal charge automatiquement le charbon sur un train de berlines à traction électrique. Le charbon est ensuite acheminé jusqu’au careeau Debay (Bousquet d’Orb) par le GTB 250.
En 1993, la dernière “découverte” du bassin houiller de Graissessac située à Alzou cesse son activité. La fosse créée par cette « découverte » a laissé un front rocheux d’une hauteur de 70 mètres.
Les travaux de réaménagement de Cap Nègre et d’Alzou
Après l’arrêt de l’exploitation, les « découvertes » ont fait l’objet de très conséquents travaux de réaménagement, notamment en termes de terrassements, tant du point de vue de la stabilisation des talus, dans la gestion des eaux que dans l’aspect paysager. A la fermeture des mines, les excavations ont été comblées, le paysage remodelé, les terres de couverture remises en places, les herbacées semées et les arbres plantés. A ce jour le site à repris une allure naturelle, même si on devine à certains endroit les marques du passage des engins.

Lors du démantèlement des dernières installations de la mine de Cap Nègre, la clairière d’Alzou servait de base pour les bureaux et les engins. A la fin de l’exploitation, le Mont Sénégra était devenu un immense gruyère percé de toutes parts, un véritable labyrinthe de plusieurs kilomètres de développement dont toutes les issues ont été condamnées par sécurité car il y avait danger à s’y aventurer.

ATTENTION … il est toujours dangereux d’essayer de s’aventurer dans les anciennes galeries de mine du secteur. Dans un rapport manuscrit (disponible dans les Archives Départementales de l’Hérault) il est fait mention d’un accident survenu en avril1978 à un homme qui s’était abrité à l’entrée d’une galerie (galerie qui n’était pas encore obstruée par des murs de béton).
Il existe cependant plusieurs vestiges à l’extérieur, relativement accessibles, à découvrir en surface près des mines Leenhardt et Verrière. Mais la prudence reste de mise.


La tâche blanche a
pratiquement disparu grâce au reboisement artificiel et naturel
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